Entre stratégie sociale et quête érudite : les notables normands et la fabrication de la Normandie au XIXe siècle

Par François Guillet
Français

Dans l’histoire des processus de fabrication des images régionales en France au XIXe siècle, l’exemple normand diffère nettement de l’exemple breton étudié par Catherine Bertho. La Révolution ne se traduit pas seulement par des réformes qui mettent fin à l’existence juridique et institutionnelle de la province, elle donne lieu également à des transformations sociales qui touchent les élites de la province et modifient leur rapport à la « patrie » normande, qui bascule désormais du côté du passé. L’exil subi par une partie d’entre elles – rupture essentielle dans la vie de nombre de nobles et d’ecclésiastiques – accompagne un renouvellement et un élargissement qui alimentent l’essor d’une sociabilité érudite s’attelant dès les années 1800 à une exploration complète de ce qui constitue désormais un lieu de mémoire. Instrument de domination sociale pour des notables dont le régionalisme s’appuie sur un très dense réseau de sociétés savantes, cette quête savante vise à mettre au jour les fondements naturels et historiques de la province et donne naissance à une école d’archéologie médiévale dont le rayonnement d’Arcisse de Caumont atteste l’importance. Alimentant les œuvres des écrivains et des artistes romantiques français et anglais, cette construction intellectuelle est diffusée auprès d’un public qui ne cesse de s’élargir grâce au développement du tourisme, auquel les antiquaires normands répondent en rédigeant des guides de voyage.

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