Les « gradés » de préfecture ou l'émergence contrariée de nouveaux « cadres » administratifs au XIXe siècle

Par Jean Le Bihan
Français

Cet article souhaite éclairer l’histoire d’un groupe méconnu : les agents de grade intermédiaire des préfectures et sous-préfectures (chefs de division et de bureau, secrétaires), agents placés à la fois sous l’autorité des fonctionnaires préfectoraux (préfets, secrétaires généraux, sous-préfets) et à la tête d’un certain nombre d’employés. L’examen de leurs fonctions prouve que ces agents jouent un rôle de plus en plus stratégique au sein de l’administration préfectorale. Leurs compétences techniques en effet s’accroissent, tandis que leur mission d’encadrement s’affirme. En même temps, l’absence de statut national, qui est aussi le lot de leurs subordonnés, entrave leur émergence en tant que groupe à part entière. Leurs carrières demeurent étroites, limitées tant au plan de l’avancement que du déplacement, et leur action collective est pénalisée par leur statut départemental. Il faut alors se demander ce qui les distingue de simples employés. La réponse est sans doute à chercher du côté des traitements, ainsi peut-être que des médailles et des titres, qu’on peut interpréter comme autant de dédommagements symboliques. Au final, l’histoire des « gradés » de préfecture constitue un bon exemple de retard du droit sur les faits; elle montre que l’émergence de certains groupes administratifs intermédiaires au XIXe siècle est un phénomène plus complexe qu’il n’y paraît, qui mérite réévaluation.

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