Incarcération des femmes palestiniennes et engagement (1967-2009)
Résumé
L’enfermement est une expérience centrale dans les Territoires palestiniens occupés par Israël en 1967. Depuis cette date, près d’un tiers des Palestiniens ont été incarcérés dans les établissements pénitentiaires israéliens pour des raisons politiques. Ce mouvement concerne aussi les femmes. Plusieurs générations se sont succédé et différents modes d’incarcération ont créé des subjectivités distinctes.
Jusqu’à la première Intifada, en 1987, les femmes emprisonnées étaient des politiques engagées dans la résistance à l’occupation de la Cisjordanie et de la bande de Gaza. Puis les arrestations sont devenues plus massives. L’engagement des premières prisonnières s’est d’abord construit vis-à-vis de leurs pères, comme un héritage ou une transmission ancrés sur des traumatismes d’enfance liés à l’occupation. Le moment carcéral a contribué à élaborer des engagements politiques qui ont aussi été des engagements féministes et la prison reconstruite comme un lieu d’apprentissage affirmant une identité de prisonnière politique, forgée dans les luttes conduites pour améliorer les conditions de détentions et renforçant le corps collectif national palestinien. Ces combats ont fortement mis en jeu les corps féminins particulièrement éprouvés par l’incarcération et les interrogatoires. Parce que le corps des femmes et leur sexualité représentent un enjeu au sein de la société palestinienne, les interrogateurs les ont utilisés comme moyens de pression. En retour, des argumentaires se sont construits pour protéger les femmes de l’opprobre jeté sur les ex-détenues. La prison a été un lieu majeur où la société a fait corps contre l’occupant. Mais avec l’échec des accords d’Oslo, la seconde Intifada en 2000 et le durcissement du système carcéral et les divisions partisanes palestiniens, ce corps collectif est de plus en plus éprouvé par la politique israélienne du tout carcéral.