La cantine à l'ère des « réformes ». Le repas du midi dans une grande entreprise publique en France dans les années 1990
Au milieu des années 1990, une enquête de type ethnographique s’est intéressée aux modes d’alimentation sur le lieu de travail à EDF-GDF, particulièrement à la pause méridienne. Qu’il s’agisse du réfectoire, de la cantine ou du bureau, l’analyse des pratiques alimentaires hors domicile permet de saisir ce que les individus mettent en jeu dans l’usage pratique qu’ils font de ce temps de pause de 35 minutes. Le réfectoire est, historiquement, un lieu fort de l’identité ouvrière lié aux particularités des métiers d’EGF. Malgré les tensions nées du processus de standardisation de la pause méridienne, la restauration collective demeure dans l’entreprise une pratique majoritaire, hommes et femmes confondus. Le repas peut aussi se prendre au bureau ou au réfectoire, la première pratique étant plus féminine et la seconde plus masculine. Au-delà des façons de faire à l’égard de ce temps et des façons de le penser, qui varient sensiblement selon les sexes, prédomine une même logique, celle d’échapper aux contraintes inhérentes au système de dépendance ou de domination dans lequel chacun se trouve, ou du moins de les détourner à son profit.